• La magie dans le christianisme

     

    Bien avant la venue du Christ ou l’avènement de l'Eglise  catholique, l'Ancien Testament condamne déjà la magie et ses adeptes
    - "Je retrancherai de ta main les sorcelleries, et il n'y aura plus pour toi de magicien" déclare le Livre de Michée, et Dieu d'ordonner dans l'Exode : " Tu ne laisseras point vivre  la magicienne. "

    Si l'empereur Constantin Ier, dont l'Edit de 313 met fin à la persécution des chrétiens, tolère une magie thérapeutique ou protectrice des récoltes, ses successeurs élevés dans la foi en Jésus, jugent sans distinction toute pratique magique comme l'atteste l'historien Jean Gaudemet " Ammien Marcellin signale des condamnations à mort sous Constance, en 356, et sous Valentinien, en 371, en particulier pour ces cas de magie curative, que Constantin avait tolérée. "

    Plusieurs conciles du IXe siècle précisent le rapport du christianisme à la magie : Ancyre prescrit cinq ans de pénitence à ceux qui "consultent les devins" ou aux sorciers, tandis que Laodicée excommunie les prêtres et les clercs qui se seraient adonnés à la magie, à la sorcellerie, à l'astrologie ou au calcul divinatoire. Père de l'Eglise, saint Augustin définit la magie comme une activité démoniaque, de même que l’ecclésiastique Isidore de Séville qui, en 630 affirme que les magiciens "perturbent les éléments, troublent l'esprit des hommes, et, sans absorption d'aucune potion, seulement par la violence de leurs incantations, tuent ".       

    Cependant, les faits ne blâment pas aussi rudement les sorciers, que l'on admet même au sein de la communauté. Une magie plus noble, faite de divination, d'astrologie ou de chiromancie se voit quant à elle réservée aux élites lettrées. Le haut Moyen Âge s'écoulant, on en vient même à douter de la réalité de ces phénomènes, fantasmes diaboliques d'individus fragiles qui, victimes de leur esprit superstitieux, finiront par s'envoler au sabbat.

    La magie dans le christianisme

    Marqué par les ravages de la peste noire, les divisions du grand schisme de l'Eglise, les morts de la guerre de Cent Ans et, dès la fin du XVe siècle, la crise spirituelle entourant la Réforme protestante, le XIVe siècle inaugure un monde où les serviteurs de Satan trouvent une place, un univers sans repères pour la population qui trouve un bouc émissaire idéal en la figure de la sorcière.   

    1326 sonne le glas de cet héritage païen quand le pape Jean XXII  requalifie la magie - nouvelle cible de l'inquisition - d'hérésie, avant qu’Innocent VII n’officialise en 1484 la chasse aux sorcières. A partir de 1520, les accusés sont jugés par les tribunaux laïcs dont la soif de flammes excède largement celle des autorités catholiques. On compte ainsi entre 30 000 et 50 000 victimes tuée, en grande partie durant la Renaissance et en pays protestants. Les massacres s'interrompent en 1672 alors que l'affaire des Poisons secoue, sur fond de sorcellerie, la cour du roi Soleil, éclaboussant même madame de Montespan, la maîtresse du roi. Pour lui éviter un funeste destin, Louis XIV interdit désormais les bûchers.

    La méfiance du christianisme à l'égard de la magie ne le détourne pas pour autant du merveilleux, symbolisé par le miracle. Mais pourquoi les apparitions de l'Immaculée Conception à Lourdes, la résurrection de Lazare ou le vin des Noces de Cana ne constitueraient-ils pas une forme de magie ? Pour Franz Rosenzweig, philosophe juif, " le miracle est prophétisé et... réalise une prophétie. L'acte de magie est une action de l'homme qui, par ses pouvoirs, tente, par ruse ou par force, de contrer les lois de la nature et, par conséquent, la Providence divine ". 

    Le mode de pensée cartésien se développant à partir du XVIIe siècle pour finir par dominer au fil du temps, les théologiens renforcent l'examen critique du miracle, espérant ainsi apporter la preuve indiscutable de son existence et rendre évidentes les conversions. Mais les hypothèses proposées par la science contesteront sans cesse la véracité de ce phénomène. Aujourd'hui, tandis que la liberté de culte et le rationalisme hérité des Lumières se sont généralisés en Occident, les miracles n'ont pourtant pas tout à fait disparu. Des guérisons que la science n'explique pas totalement ont parfois lieu sur certains sites marqués par le passage d'un saint, qui ravivent la croyance des fidèles en ce type d'événement extraordinaire.  

          


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  • La fête des Fous

    En ouvrant son roman Notre-Dame de Paris sur la fête des Fous, Victor Hugo plonge immédiatement son lecteur dans une atmosphère de liesse populaire : " L'acclamation fut unanime : on se précipita vers la chapelle. On fit sortir le bienheureux pape des fous. Mais c'est alors que la surprise et l'admiration furent à leur comble ; la grimace était son visage.... une grosse tête hérissée de cheveux roux, entre les deux épaules une bosse énorme... Tel était le pape que les fous venaient de se donner. "

    Au XVe siècle, époque où se déroule le roman d'Hugo, la fête des Fous est, par son contenu, une véritable expression du temps à l'envers ; c'est selon la formule de l'historien Jacques Heers, " la célébration du désordre, du reversement des hiérarchies ", Organisée à l'intérieur des églises et des cathédrales, la fête des fous était un événement qui se déroulait généralement entre le 25 décembre et le 6 janvier où les sous-diacres prenaient la place des hauts dignitaires pour danser, chanter des cantiques et professer des sermons grossiers et obscènes. Au point culminant de la fête, on élisait le pape des Fous, la plupart du temps un diacre, souvent même un profane ou un étudiant.

    La fête des Fous

    Pour être élu, il s'agissait de passer sa tête dans un trou et de faire la grimace la plus laide possible. Le roi était ensuite promené, déguisé en évêque, à travers les rues de la ville, monté sur un âne. Il portait la mitre et le bonnet des fous de cours. Cette procession le conduisait solennellement à l'église ou à la cathédrale. Lorsque celui-ci s’asseyait sur le siège épiscopal après être entré dans l'édifice à l’envers sur un âne, l'office pouvait débuter. Les gestes du cérémonial étaient alors méthodiquement inversés. On y jouait souvent aux cartes et aux dés. Les bagarres étaient rares et ces rituels débridés où se mélangeaient membres du clergé et hommes du peuple échappèrent peu à peu au contrôle des autorités ecclésiastiques.

    C'est pourquoi le Concile de Nantes en 1431 et celui de Bâle en 1435 cherchèrent à proscrire la fête des
    Fous " et autres abus qui régnaient en plusieurs églises ". La disparition de la fête des Fous semble alors avoir conduit à la formation plus laïque du carnaval qui dès le XVe siècle, fut pris en charge par les instances de la société civile. Il n'en demeure pas moins que les rituels d'inversion, la présence d'un peuple de fous, les cavalcades, les mascarades, les déguisements collectifs et les défilés de chars puisent leur origine dans cette tradition médiévale de la fête des Fous.

    L'historien Jacques Heers estime que la fête de Saint Nicolas - patron des marins et des enfants, qui jouit d'une dévotion très populaire en Occident - , le 6 décembre, ouvre les festivités de la fête des Fous. D'autres auteurs considèrent que le début des festivités  est le jour de la fête des saints Innocent, commémorant le massacre des Innocents. Mais la plupart des historiens s'accordent à faire coïncider le début de la fête des Fous avec le 25 décembre, jour de Noël.         

     


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  • Noël - 25 décembre

    Au Moyen Âge, Noël ouvre une période clé du calendrier liturgique chrétien. Cette période dite "des douze jours" va du 25 décembre au 6 janvier (jour de l’Épiphanie). Elle se caractérise par un ensemble de rites et de mythes qui ont survécu jusqu'à nos jours mais dont on ignore souvent l'origine. Le fête de Noël telle que nous la connaissons aujourd'hui apparaît donc comme une manifestation d'une fusion de coutumes préexistantes qui trouvent leurs fondements dans les rites antiques mais dont les principaux éléments semblent fixés par la mythologie chrétienne de la période médiévale.

    Pour le christianisme, Noël célèbre la naissance du Christ. Le 25 décembre a été reconnu fort tardivement comme le jour anniversaire de la naissance de Jésus. En effet, selon les époques et les diverses religions chrétiennes, avant d'être fixée au 25 décembre ; cette date anniversaire a été placée à différents moments de l'année : le 6 janvier (Épiphanie), le 25 mars (Annonciation), le 10 avril ou encore le 29 mai. Le théologien Clément d'Alexandrie, qui a écrit vers 200 après J.-C. mentionne certaines des dates qui ont déjà été proposées comme la date authentique de la naissance de Jésus Christ. Les nativités printanières étaient les plus populaires, avec de nombreuses dates en mars, en avril ou en mai. Le 25 décembre n'est pas mentionné. 

    L'Eglise n'a fixé cette date qu'au IVe siècle de notre ère. La commémoration de la naissance du christ le 25 décembre résulte de contraintes à la fois saisonnières et mythologiques imposées par les croyances païennes antérieures au christianisme. En effet, l'importance accordée aux anciennes fêtes du solstice d'hiver, le souvenir des Saturnales romaines et la place considérable qu'avait acquise dans l'Empire romain le culte de Mithra expliquent pour une bonne part ce choix. Ces pratiques ne pouvaient que préparer le subtil syncrétisme mis en oeuvre par les chrétiens pour assimiler la naissance de Jésus au retour de l'astre solaire. Au milieu du IVè siècle, le 25 décembre est déjà retenu à Rome comme la fête de la Nativité du Christ. Au début du siècle suivant, la fête de Noël est placée sur pied d'égalité avec celles de Pâques et de l’Épiphanie, laquelle commémore désormais la venue des Rois mages. En 440, l'Eglise décide officiellement de célébrer la naissance du Christ le 25 décembre et Noël devient une fête d'obligation au début du VIè siècle. 

    Selon Philippe Walter : "La fête de Noël appartient au temps de la féerie et permet l'effraction de l'autre monde dans le monde humain". Noël valorise les forces de la nuits ainsi que les puissances du mystère et du merveilleux. Pour l'historien, la traduction chrétienne de cet ensemble mythique laisserait affleurer la mémoire archaïque du paganisme qui oriente la fête médiévale. A ce titre, le repas de Noël s'associe au motif du repas des fées, bien connu grâce à certains textes médiévaux ainsi qu'à certains contes folkloriques. Si l'on en croit ces textes littéraires, le repas des fées se tient à la naissance de certains enfants prédestinés. C'est ainsi que les fées se présentèrent la nuit où naquirent les héros comme Ogier le Danois ou Guillaume au court nez pour doter l'enfant de grandes vertus. N'était-il pas naturel alors de fixer la nativité du Christ durant cette nuit des mères - ou nuit des fées - au cours de laquelle on célébrait déjà la naissance de héros mythique parfaitement profanes ? La fixation de Noël au 25 décembre répondait alors aux coutumes païennes du repas des fée associé à une naissance exceptionnelle. 

     


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