• Glastonbury - Les archéologues fantômes*

     

    Glastonbury - Les archéologues fantômes

    Se croyant protégé par le succès des fouilles qu'il dirigea à Glastonbury, Frederick Bligh Bond pensa qu'il pouvait, en toute sécurité, révéler la source de ses informations. Mais il se trompait tragiquement.

    Il faut admettre que Frederick  Bligh Bond  était un bien étrange personnage. Malgré la grande admiration qu'il lui porte, son biographe, William Kennawel, reconnait cependant que Bond était paranoïaque. Mais en ce qui concerne Glastonbury, ses suspicions étaient en partie fondées. Ses deux associés, W.D. Caroe et Dean J.A. Robinson, ne voyaient en lui qu'un farfelu dont il fallait se débarrasser.

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    L'extraordinaire succès des fouilles le plaça dans une position forte. Ses ennemis étaient heureusement loin de se douter de ce qui expliquait cette réussite ! Les esprits qui se manifestaient sous le nom de " Compagnie d'Avalon " avaient un autre objectif, plus essentiel, que celui d'aider à retrouver les vestiges du passé glorieux de l'abbaye : ils voulaient refaire de Glastonbury un foyer culturel et religieux. Le poids de ce secret peut expliquer en partie l'étrange comportement de Bond.

    E ce n'était pas le seul secret à préserver ! Les esprits des moines qui guidaient le crayon de Bartlett procuraient toutes sortes d'informations historiques importante. En 1908, alors que Bond faisait creuser le long du côté sud de la nef dans l'espoir de retrouver les deux tours que les interlocuteurs de l'au-delà avaient mentionnées, on mit au jour un squelette géant. C'était celui d'un vieil homme. Il faisait presque 2 m et avait été enterré sans cercueil. Plus étrange encore, on trouva un crâne entre les jambes du squelette du squelette. Ce genre de mystère donna des cauchemars aux archéologues ! S'agissait-il d'un meurtre ? Sans doute que non : on avait pris soin de déposer un oreiller de pierre sous la tête du vieil homme.

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    Bond eut, bien sûr, recours à la méthode habituelle. Il s'installera avec Bartlett à la table de séance et attendit que les moines se manifestent.
    Le crayon ne tarda pas à tracer les réponses sur le papier. L'interlocuteur, un moine du nom de Gulielmus ( Guillaume ), déclara que le squelette était celui de Radulphus Cancellarius ( Radulphus le Trésorier ), qui avait tué Eawulf en combat singulier avec sa hache, lui cassant quelques os.
    Radulphus survécut à ses blessures et mourut à l'âge respectable
    de 103 ans. Il demanda à être enterré à droite de l'église qu'il aimait tant.
    Mais, quand les moines creusèrent la tombe, ils découvrirent avec stupéfaction les ossements de son ancien ennemi, Eawulf. Ils les enterrèrent donc au même endroit.

    Qui était ces hommes ? Apparemment, Radulphus, ou Ralph, était un Normand venu en Angleterre avec Guillaume le Conquérant, Gulielmus mentionna la date de 1087, Eawulf était un noble saxon. Un Normand du nom de Thurstan était alors à la tête de l’abbaye.

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    On sait que lorsque les Normands prirent l'abbaye de Glastonbury, ils ne ménagèrent pas les moines saxons qui appartenaient à un ordre irlandais. L'abbé Thurstan mena la persécution. Il se montra si cruel que Guillaume le Conquérant le chassa. Mais qui était Eawulf ? L'histoire n'a pas retenu son nom.

    Interrogé, un esprit répondit qu'il était comte d'Edgarley, " un preux saxon, un de ceux qui affirmaient que Glastonbury avait été construite par les Saxons et que saxonne elle devait rester ". Voici ce qui se passa vraisemblablement : les soldats normands tuèrent des moines saxons de l'abbaye. Le comte Eawulf d'Edgarley, petit village situé à 1,600 km au sud-est de Glastonbury, attaqua les Normands par mesure de représailles. Il trouva la mort dans un combat singulier avec Radulphus, le trésorier et fut enseveli, sans cercueil, à l'extérieur de l'abbaye.

    C'était une histoire fascinante, mais était-elle exacte ? C'était le moment ou jamais de vérifier si les esprits des moines disaient la vérité.

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    Ni Bond, ni Bartlett, ni personne d'autre n'avait jamais entendu parlé du Comte Eawulf d'Edgarley. S'il avait vraiment existé, cela prouverait que les messages venaient vraiment de l'au-delà et non de l'inconscient des deux hommes.

    On examina le squelette de Radulphus pour vérifier s'il présentait, comme le moine Gulielmus l'affirmait, des traces de fracture causée par la hache d'Eawulf. On trouva effectivement une trace de fracture : l'avant-bras avait été cassé et avait guéri.

    D'autre part, un des esprits avait déclaré que les moines saxons avaient eu leur revanche : " Un autre Saxon devint abbé ". Ce qui est exact : Guillaume le Conquérant remplaça le Normand Thurstan par le saxon Herlewin.

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    Mais Eawulf avait-il existé ? Bond examina scrupuleusement tous les documents possibles, mais sans succès. L'histoire n'avait rien à dire sur le comte Eawulf d'Edgarley. Puis, dans une ancienne chronique écrite par un certain Fabius Ethelwerd, daté de l'an 866 après J-C, il trouva la phrase suivante : " En cette année  866 est décédé Eanulf, noble de la province de Somerset. " Puis, plus loin : Son corps repose dans le monastère de Glastinga byrig ( aujourd'hui Glastonbury ).

    Ceci prouvait qu'un noble dont le nom était très proche de celui d'Eawulf ( un N au lieu d'un W ) avait vécu dans le Somerset et connaissait l'abbaye. Eanulf était-il une autre version d'Eawulf ?
    Bond continua ses recherches. Il trouva une autre chronique,
    Les Annales des exploits d'Alfred, d'Asser, datée de 855. On y mentionnait le nom de " Eanulf, le comte de Summurton ". Sans aucun doute, c'est du même Eanulf qu'il s'agit, car dans les deux chroniques, son nom est associé à un certain évêque Ealhstan. Et Somerton est très proche d'Edgarley.

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    Bien entendu, les dates ne concordent pas : il manque deux siècles à l'Eanulf des deux chroniques pour avoir été tué par Radulphus le Trésorier. Mais c'est de toute évidence un ancêtre. L'essentiel reste que Bond prouva qu'un comte d'Edgarley existait bien dans la région de Glastonbury deux siècles avant le combat qui opposa Eawulf et Radulphus. C'est une des preuves les plus remarquables et les plus convaincantes de l'existence objective des mystérieux interlocuteurs de Bond.

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    La position de Bond ait été difficile. Il savait comment expliquer le mystère du squelette de 2 m et du crâne, pourtant il ne pouvait rien révéler tant qu'il n'avait pas de preuve. On comprend que Bond soit passé pour " arrogant ".

    Mais il y avait bien plus important. Et Bond était de plus en plus partagé entre la prudence et la nécessité de révéler ce que lui répétaient les esprits. " Notre abbaye, disaient-ils, est un message en pierre. Dans les fondations et dans le plan de construction se trouve un mystère - le mystère de notre Foi - que vous avez oublié. " Des études récentes ont montré que les églises et les cathédrales médiévales étaient construites selon un code numérique précis. Ce code enferme-t-il les secrets des Anciens ? Beaucoup le croient.

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    Très intéressé par cet aspect occulte de son art, Bond se mit à l'étude de la cabale et des grands livres ésotériques. Il s'appliqua ensuite à découvrir dans l'abbaye de Glastonbury les relations entre les mots et les nombres.

    En 1916, il donna une conférence à la société d'archéologie du Sommerset. Le sujeu était : " La chapelle Notre-Dame de l'abbaye de Glastonbury, une étude des mesures et des proportions. " Dans le public, son patron, le doyen Robinson, ne cachait pas son mécontentement.

    Finalement, Bond décida de lever le voile. Il publia en 1918 un livre intitulé The Gate Of Remembrance ( La Porte du souvenir ), où il racontait l'histoire cachée des fouilles depuis la première séance spirite de novembre 1908.

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    Les conséquences ne se firent pas attendre : on lui retira immédiatement les fonds nécessaires à la poursuite des travaux. Un codirecteur fut engagé et on entrava son travail de toutes les façons possibles.
    En 1921, il était réduit à répertorier et à nettoyer ses premières fouilles pour 10 livres sterling par mois.

    En 1922, il reçut une lettre qui commençait comme suit :
    " Le conseil de cette société vous informe que vous n'êtes plus responsable des fouilles entreprises à l'abbaye de Glastonbury et que le comité qui s'en occupait est par conséquent dissous... ".

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    Pourquoi l'Eglise d'Angleterre s'était-elle si violemment opposée aux méthodes de Bond ?

     


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