• Basilic*

    Basilic

    Au cours des âges, le Basilic évolua vers la laideur et l'horreur ; maintenant on l'oublie. Son nom signifie petit roi ; pour Pline l'Ancien, le Basilic était un serpent qui sur la tête avait une tache claire en forme de couronne. A partir du Moyen-Age, c'est un coq quadrupède et couronné, de plumage jaune, avec de grandes ailes épineuses et une queue de serpent qui peut finir en crochet ou en une autre tête de coq. Le changement d'aspect se reflète dans un changement de nom ; Chaucer, au XIVe siècle, parle du basilicock. Une des gravures qui illustrent l'Histoire naturelle des serpents et dragons, d'Aldrovandi lui attribue des écailles, non des plumes, et la possession de huit pattes.

    Ce qui ne change pas est la vertu meurtrière de son regard. Les yeux des Gorgones pétrifiaient ; Lucain rapporte que du sang de l'une d'elle, Méduse, sont nés tous les serpents de Libye : l'Aspic, l'Amphisbène, l'Hammodyte, le Basilic.

    Le basilic réside au désert ; ou plutôt, il crée le désert. A ses pieds les oiseaux tombent morts et les fruits pourrissent ; l'eau des fleuves  où il s'abreuve reste empoisonnée durant des siècles. Pline a certifié que son regard brise les pierres et brûle l'herbe. L'odeur de la belette le tue ; au Moyen-Âge, on a dit que c'était le chant du coq. Les voyageurs expérimentés se pourvoyaient en coqs pour traverser des contrées inconnues. Une autre arme était un miroir ; le basilic est foudroyé par sa propre image.

    Les encyclopédistes chrétiens refusèrent les fables mythologiques de la Pharsale et prétendirent à une explication rationnelle de l'origine du basilic. On admit généralement l'hypothèse d'un œuf contrefait et difforme, pondu par un coq et couvé par un serpent ou un crapaud. Au XVIIè siècle, sir Thomas Browne la déclara aussi monstrueuse que la génération du Basilic. Ces vers ce temps-là que Quevedo écrivit sa romance Le Basilic, où on lit :

    Si celui qui te vit est vivant
    Toute ton histoire est mensonge
    Car s'il n'est pas mort, il t'ignore,
    Et s'il est mort il ne l'affirme pas.

                             Extrait de " Le Livre des êtres imaginaires " de Jorge Luis Borges

      


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