•  

    Sur les trace de l'Australopithèque

    L'histoire de l'évolution des primates semble intimement liée aux importants bouleversements climatiques qui survinrent il y a une vingtaine de millions d'années. A cette époque, l'humidité des régions tropicales commence à diminuer progressivement, entraînant parfois de spectaculaires modifications dans le paysage : la forêt devient savane. Certains singes, plus téméraire et plus curieux que leurs congénères, n'hésitent pas à quitter leur refuge sylvestre pour s'aventurer dans ce nouvel environnement.

    Mais, dans ce milieu hostile, où rodent de puissants et féroces carnassiers, l'expérience ne tardera pas à tourner au désastre pour nombre de ces valeureux pionniers. Pour échapper à l'avidité des grands prédateurs, plus rapides, quelques simiens tentent alors de se dresser sur leurs membres postérieurs de manière à voir au-dessus des hautes herbes et à éviter toute attaque surprise.

    Sur les trace de l'Australopithèque

    Ainsi s'opère le passage de la quadrupédie à la bipédie, avec, entre autres conséquences, la libération des mains qui pourront alors servir à la fabrication d'armes et d'outils. Cette position entraîne par ailleurs un basculement progressif du crâne vers l'avant et, de ce fait, un accroissement du volume de la partie postérieure du cerveau.

    Cette hypothèse illustre magnifiquement la théorie de Darwin, montrant le rôle prépondérant de la pression sélective du milieu sur l'évolution. Seuls les singes les plus rusés, les plus intelligents, les mieux armés génétiquement, ont pu trouver les ressources nécessaires pour s'adapter et de survivre dans ce nouveau décor. Les autres furent, peu à peu, inexorablement éliminés.

    C'est ainsi que trois groupes d'hominidés se dégagèrent insensiblement de l'ensemble des singes : les Oréopithèques, les Gigantopithèques et les Ramapithèques.

    Sur les trace de l'Australopithèque

    L'Oréopithèque fut découvert en 1870 dans une roche extraite d'une mine de la région de Toscane. L'étude détaillée de sa morphologie permit aux spécialistes d'avancer que cet ancien primate, vivant près de 12 millions d'années fut un des tout premiers hominidés à adopter la position bipède. L'Oréopithèque, dont la taille n'excédait pas 1,20 m pour un poids de 40 kg, habitait les forêts et les marécages du Miocène supérieur, se déplaçant de branche en branche à l'aide de ses longs bras ou courant sur ses pattes postérieures dans les terrains un peu plus dégagés. Un autre squelette fossile de cet espèce fut mis au jour en 1958 par le Suisse J. Hürzeler.

    Sur les trace de l'Australopithèque

    En ce qui concerne le Gigantopithèque, seuls quelques fragments de mâchoires furent retrouvés en Chine dans des sites vieux
    de 2 à 10 millions d'années. Cet animal de taille exceptionnelle serait, de l'avis de certains savants, l'ancêtre de l' " abominable homme
    des neiges ", le mystérieux Yéti...

    Le troisième groupe, celui des Ramapithèques, est de loin le plus intéressant, dans la mesure où tous les éléments sembleraient le désigner comme l'ancêtre directe de l'homme actuel.
    Ces hominidés, dont on a exhumé les restes en Asie, en Europe et en Afrique, firent sans doute leur apparition il y a une vingtaine de millions d'années pour s'éteindre il y a seulement 7 millions d'années. L'étude de ces fossiles nous permet de penser que nous avons affaire à un animal pesant de 30 à 35 kg et probablement végétarien.

    Sur les trace de l'Australopithèque

    Il y a 12 millions d'années apparaissent enfin ceux que l'on peut à juste titre considérer comme les premiers hominidés : les Australopithèques. Et pourtant, la première trace que l'on puisse, sans ambiguïté aucune, attribuer à ces hominidés ne date que de 6 millions d'années au plus.
    Quant au plus récent de ces Australopithèques, un Australopithécus africanus âgé de 6 ans et découvert en 1924 par le célèbre naturaliste australien Raymond Dart, il vivait en Afrique du Sud il y a
    quelque 800 000 ans.

    A l'époque où vivaient ces australopithèques, il y a 2 millions d'années environ, naissait un autre hominidé, plus évolué, muni d'un cerveau plus volumineux, considéré comme le premier homme par la plupart des scientifiques contemporains : l'Homo habilis, le plus ancien représentant du genre Homo. (L'Homo habilis est lui aussi d'origine africaine : on en a retrouvé les traces en Afrique de l'Est, en Ethiopie et au Kenya, et en Afrique du Sud, à Sterkfontein. )

    Sur les trace de l'Australopithèque

    L'Homo habilis n'avait pas un régime de végétarien endurci comme les Australopithèques des bois avec lesquels il cohabitait, mais était incontestablement un omnivore.
    D'autres indices tendent à prouver que notre ancêtre déclencha la première révolution culturelle de l'histoire humaine : monticules de pierres servant à maintenir des poteaux qui auraient soutenu des abris, cailloux taillés pour en faire des outils, murets de roches disposés en arc de cercle comme pour constituer un paravent...

    Yves Coppens n'hésite pas à faire remonter l'apparition du langage, qui a dû jouer un rôle considérable dans les processus de transmission culturelle, à il y a 2 millions d'années. Toutes ces innovations amènent beaucoup de spécialistes à penser que l'Homo habilis aurait fort bien pu se servir de l'Australoithécus boisei comme d'un vulgaire gibier.

    Sur les trace de l'Australopithèque

    Chasseur ou non, cet homme primitif avait coutume de transporter la viande découpée loin du lieu de débitage, de manière à éviter les mauvaises rencontres ; il partageait ensuite son butin avec les siens. Tout en démarquant l'Homo habilis du reste du monde animal, ce genre de pratiques a sans doute contribué à resserrer les liens du groupe.

    Une intéressante hypothèse a été avancée par J.H. Fremlin, de l'université de Birmingham : selon cet éminent savant, la guerre aurait fort bien pu être à l'origine du développement  de l'intelligence.
    En effet, explique Fremlin, " il n'y a pas de limites utiles d'intelligence dans une compétition entre membres d'une même espèce. "

    Sur les trace de l'Australopithèque

    Cette classification, distinguant quatre formes parmi les hominidés fossiles qui vivaient il y a quelque 2 millions d'années, n'était pourtant guère satisfaisante. Certaines espèces présentent en effet des caractères de l'Australopithecus africanus mêlés à d'autres caractères, plus évolués, que l'on retrouve chez l'Homo habilis.

    Parmi ces fossiles un tant soit peu particuliers se trouve le squelette presque complet d'une femme d'une vingtaine d'années, prénommée Lucie par les paléontologistes. Des chercheurs que les restes découverts en 1974 sur un site vieux de 3 millions d'années, appartenaient à une nouvelle espèce dénommée pour la circonstance Australopithécus afarensis. Les fossiles d'Australopithèques, vieux de plus de 3 millions d'années, découverts en 1978 et 1979 sur un site en Tanzanie, appartiendraient eux aussi à la même espèce. Il semble que l'on tiendrait enfin le fameux " chaînon manquant " !

    L'homme ne va désormais pas tarder à se répandre sur toute la planète. L'homme habile, il devient alors astucieux. Le feu va faire de lui le maître du monde.

                                                                                   Extrait de " Inexpliqué " 1981

     


    votre commentaire
  •  

    Ys, la Légende

    Ahès, la fille du roi Gradlon, est restée très près de son peuple et de ses croyances païennes. L'emprise grandissante du clergé chrétien sur son père et sur les affaires du royaume de Cornouailles la met mal à l'aise : elle décide de fuir Quimper, la capitale du roi Gradlon.

    Avant de partir, elle supplie son père :
    " Naguère, on trouvait à Quimper aise et liberté. Chacun portait habits et joyaux à sa guise et il m'advenait d'y rencontrer figures riantes, coiffures de fête et bandes joyeuses. Aujourd'hui, ce ne sont que robe de bure, crânes ras et grise mines. Les jeunes gens ressemblent aux vieillards. Gaïté n'a plus d'asile et vos moines, Seigneur, la mèneront en terre avant longtemps, au chant funèbre des litanies. Seigneur, je languis et je meurs. Bâtissez pour moi, au bord de la mer, une cité neuve, loin de vos forêts pleine d'ermites et de vos villes pleines de monastères. "

    Ys, la Légende de Dahud, la bonne sorcière d'Ys

    Le roi Gradlon cède aux désirs de sa fille unique. Il lui construit " une grande ville située sur le bord de la mer, entre le cap de Fontenoy et la pointe de Croazon, où est, de présent, le golfe ou baie de Douarnenez et cette ville s'appelait Ys "

    La cité est magnifique : " Ys, protégée par une immense digue fermée de portes de bronze, ne vit pas précisément à l'heure chrétienne ni selon les mœurs préconisées par Corentin. Le roi lui-même aime y venir pour retrouver le visage de Malgwen, sa femme morte, la mère d'Ahès, et l'écho perdu de sa jeunesse.

    Ys, la Légende de Dahud, la bonne sorcière d'Ys

    Gwénolé, le conseiller chrétien du roi Gradlon, tente bien de ramener la population dans le droit chemin de l'Eglise. Il lance de terrifiantes prédictions :
    " Vous avez bâti contre la mer, mais la mer est plus forte que vous. Elle vous envahira et elle submergera vos demeures. De même que vous avez bâti contre Dieu dans vos âmes, Dieu vous laissera"

    Les habitants d'Ys ne se soucient pas de ces paroles. Ils préfèrent suivre leur liberté retrouvée et leur belle princesse, qu'ils nomment Dahud, la "bonne sorcière". Malgré tout, celle-ci commence à être envahie d'un certain ennui : un seul objet lui est refusé, et c'est celui qui la tente le plus. Elle veut le pouvoir sur les écluses. Elle veut la clé d'or que détient le roi Gradlon.

    Ys, la Légende de Dahud, la bonne sorcière d'Ys

    Elle sent aussi, insidieusement, le pouvoir des prêtres resserrer sa sombre emprise autour d'elle. Alors, par une nuit d'orage et de tempête, elle subtilise les clés du roi et déchaîne les vagues immenses de l'océan furieux. Car elle préfère " la mort subite à l'abjection de la mort lente " !

    Les eaux se ruent dans les plus bas quartiers de la ville. Les habitants hurlent. Gwénolé, averti par un songe se précipite au secours du roi et l'adjure de fuir dans l'instant. Au milieu de ses sujets pris de panique, Gradlon tente de retrouver sa fille, pour l'arracher aux eaux grondantes. A peine la trouve-t-il qu'il l'emporte sur la croupe de Morvac'h, son fameux coursier...

    Ys, la Légende de Dahud, la bonne sorcière d'Ys

    Malgré toute sa force, Morvac'h ne peut rien contre la puissance des flots. Les lames rivalisent de vitesse avec lui. Par trois fois, Gwénolé enjoint au roi de rejeter à la mer le "démon" qu'il porte en croupe et dont les "péchés" alourdissent l'animal fabuleux.

    Gradlon ne peut s'y résoudre. Ahès est sa fille unique, née d'un amour parmi les plus grands que les hommes aient connus. C'est finalement le prêtre, qui, de sa crosse épiscopale, repoussera la fille du roi dans la mer. A l'instant même, la violence des flots déchaînés s'apaise. Le sacrifice est consommé !

    Ys, la Légende de Dahud, la bonne sorcière d'Ys

    Née de la mer, Ahès est retournée à la mer. Là où s'étendait une cité merveilleuse roule une houle tranquille.

    Voici donc la forme pure de la légende de la ville d'Ys, telle que l'a retranscrite Albert le Grand, religieux de Morlaix, dans ses Vies des Saints de la Bretagne Armorique, qui datent du XVIIè siècle.

    Ys, la Légende de Dahud, la bonne sorcière d'Ys

    Au XIXè siècle, cette riche matière ne pouvait que tenter les écrivains et les poètes. Pas toujours avec bonheur, mais on peut mettre à part la
    Submersion de la ville d'Ys, du Barzas Breiz. Même si elle est apocryphe, cette ballade a profondément marqué les esprits par sa beauté et son charme évocateur.

    Autour d'Ys, les légendes populaires ont continué à fleurir dont quelques unes font intervenir le célèbre enchanteur Merlin : celui qui est assez courageux pour tenter l'aventure peut trouver, au fond du palais royal d'Ys, qui reparaît à minuit lors de la Grande Troménie de Locronan, un anneau de coudrier. Cet anneau est porteur de tous les pouvoirs dont l'Enchanteur l'avait chargé avant de l'offrir au roi Gradlon. Mais attention ! Il ne faudra pas se laisser détourner par les richesses exposées, ni par les somptueuses et lascives créatures qui hantent les lieux :  aussitôt sonné le douzième coup de minuit, les eaux ne manqueraient pas alors d'engloutir leur proie...

    Ys, la Légende de Dahud, la bonne sorcière d'Ys

    Une fois refermé le grand livre des légendes, il convient de s'interroger sur la réalité que peut cacher le conte. Où la tradition localise-t-elle la ville d'Ys ?

    Le site le plus probable se trouve dans le quart sud-ouest de la côte du Finistère.  Au large de Penmarc'h, les basses eaux découvrent ainsi des restes mégalithiques. Au siècle dernier, une messe était encore célébrée en pleine mer, au dessus de ces pierres sacrées des anciens Celtes !

    Une ancienne croyance affirme également qu'une allée d'arbres reliait Loctudy aux îles Glénan, à 12 km au large : on a retrouvé des troncs d'arbres en voie de fossilisation sur une grève, près de Loctudy... Ils étaient plantés en direction des Glénan.

    Ys, la Légende de Dahud, la bonne sorcière d'Ys

    Dans la relation de son voyage au Finistère qui date de 1794, Gamby note : " C'est à la pointe de la Chèvre qu'on trouve les ruines anciennes dont j'ai parlé dans mon catalogue. C'est là qu'était, suivant la tradition, la superbe ville d'Ys, gouvernée par le roi Gradlon. "

    En 1836, dans la réédition de cette relation, le chevalier de Fréminville, grand amateur d' " antiquité " bretonnes, porte une note au sujet de la pointe du Raz :
    " Aujourd'hui, on en voit (des ruines) aucune trace, mais elle consistaient en une vaste enceinte carrée, construite en cailloutage noyé dans un ciment très dur. On trouvait fréquemment autour de cette muraille de pierre des pierres tumulaires, des cercueils en forme d'auge, des urnes, etc.., avec des inscriptions en caractères illisibles. On remarquait encore les traces de deux ou trois chemins ferrés, qui venaient de différentes directions et qui aboutissaient à ces ruines. Au surplus, si on ne peut affirmer avec certitude qu'elles eussent été celle de la fameuse ville d'Ys, on peut du moins reconnaître qu'elle se réunissent aux traditions les plus vraisemblables pour fixer la position de cette cité sur la pointe du Raz. "

    Constatons aussi que, Plouger, près du Raz, un reste de muraille porte le nom de Moguer a Is ( ou Ahès ), ce qui signifie " le mur d'Is ". On sait que les noms de lieux sont souvent ceux qui défient le plus l'érosion du temps et de la mémoire.

    Ys, la Légende de Dahud, la bonne sorcière d'Ys

    Pourtant plus qu'ailleurs, c'est à Douarnenez que l'on rencontre le plus d'indices troublants. Une des étymologie du nom de la ville ne
    la donne-t- elle pas pour la " nouvelle terre " (douar nevez ), ce qui laisserait entendre que l' "ancienne" est ailleurs, au fond des eaux ?
    De même, on a pu penser que Douarnenez pouvait être douar an enez,
    la " terre de l'île " ; on peut supposer que cette île aurait été engloutie au cours de la catastrophe.

    La submersion d'une cité dans les parages de Douarnenez n'a rien d'improbable. Au contraire ! Le littoral breton était constellé de petites cités, établissements côtiers gallo-romains dont les ports servaient de relais entre les pays du Nord, la Bretagne insulaire et les territoires de la Gaule romaine.

    Ys, la Légende de Dahud, la bonne sorcière d'Ys

    On est encore plus frappé par l'observation des voies romaines
    du sud-ouest de l'Armorique. Au siècle dernier, on pouvait encore voir les vestiges d'une de ces voies se diriger de l'arrière-pays de Tresmallaouen droit vers le large ! Intrigué par ces marques et par celles d'une autre chaussée du même type, retrouvée près de Carhaix et surnommée dans la région Hent Ys ou Hent Ahès ( chemin d'Ys, ou chemin d'Ahès ), un érudit scrupuleux, M. de la Pasardière, a entrepris de relier les établissements romains identifiés et les tronçons de voies qui subsistaient en Armorique.

    On sait que les voies romaines étaient rectilignes, pour autant que le terrain le permettait. En Bretagne, le relief n'est guère accidenté. Or, curieusement, le réseau obtenu était des plus surprenants : les routes convergeraient nettement à 5 km en mer, au large de Douarnenez.

    Les Romains n'avaient pas l'habitude de joindre par leurs voies des points abstraits, mais des villes et des garnisons. Il faut donc conclure qu'il existait, dans ce secteur précis de la baie de Douarnenez, une cité.
    Mais s'agissait-il bien d'Ys, la ville rebelle au christianisme ? Une série d'éléments peuvent le laisser penser...

     Ys, la Légende de Dahud, la bonne sorcière d'Ys

                                                                                                                                                            Extrait de " Inexpliqué " 1981


    3 commentaires
  •  

    Ys, la cité engloutie

    Le Menez Hom, aux formes si douces, est un ancien volcan. On sait qu'un volcan n'est jamais éteint... Aujourd'hui encore, la région bretonne enregistre des secousses telluriques qui, malgré leur faible intensité, n'en sont pas moins aussi fréquentes que celles que subit l'Auvergne !

    Certains effondrements de la terre dans la mer semblent bien dus à ces phénomènes. Doit-on leur attribuer la disparition d'une ville comme Lexobie, qui était pourtant la plus grande garnison romaine d'Armorique et que les historiens sont bien incapables de situer sur une carte ?

    Ys, la cité engloutie

    En 709, un grand cataclysme a secoué toute la côte nord de l'Armorique et a fait passer sous les vagues de l'océan tous les environs de la ville d'Aleth. Toujours en 709, les îles anglo-normandes ont été coupées du continent et 9 villages ont été perdus en mer.

    En janvier 1735, une tempête d'une incroyable violence s'est déchaînée dans la baie où s'abritait Saint-Etienne-de-Paluel : en se retirant, la mer a dégagé les ruines du villages et, le temps d'une marée basse, les riverains ont pu arpenter les anciennes rues rendues pour un jour à la chaleur du soleil.

    Ces changements de la ligne des eaux ont touché bien d'autres sites. A en croire les chroniques, au XIIIè siècle, la terre bretonne a tremblé à plusieurs reprises. Certaines secousses ont ébranlé le pays
    de Vanne " pendant quarante jours, si fort que les meubles s'entrechoquaient au point de se briser. "

    Ys, la cité engloutie

    L'ilots d'Er Lannic, dans le golfe de Morbihan, est là pour en témoigner : un double cercle de menhirs, aujourd'hui à demi submergés, laisse penser que les eaux se trouvaient une dizaine de mètres plus bas au moment où ils ont été érigés.
    L'archéologue James Miln a observé dans la baie de Quiberon, au siècle dernier, un alignement de menhirs que découvraient les basses eaux des plus grandes marées. Peut-être s'agissait-il des vestiges de la ville engloutie de l'île d'Aïse, que la tradition populaire situe entre Quiberon et Belle-Ile...

    Chez les peuples celtes, l'âme l'emporte souvent sur la raison. Fortement imprégnée de mythes, la mentalité celte rend hasardeuse la tentative de séparer l'imaginaire du réel, Chuchulain, Morgane, Artus, Merlin ou le roi Marc'h : les ressources de l'imaginaire celtiques paraissent infinies.

    Dans une civilisation dont l'un des traits fondamentaux a été de reconnaître pour tradition celle que les druides se transmettaient oralement, le passé se trouve réécrit en permanence.

    Ys, la cité engloutie

    Reconnaissons ainsi comme symboliques les nom des hameau de l'antique Brocéliande : ils affichent aujourd'hui sur de très concret panneaux routiers une évidente propension naturelle au mystère et au rêve : le Pont-du-secret, Néant-sur-Yvel, Folle-Pensée, le Val-sans-Retour...

    L'étude des contes bretons, ces véritables archives de la mémoire d'un peuple, ne fait que nous conforter dans le devoir d'accepter la vérité des légendes comme une des formes de la réalité. Le Barzac Breiz, cette odyssée mi-historique mi imaginaire des Bretons, représente bien une démarche qui fait accepter le mythe comme l'essence même d'une éternelle renaissance.

    Ys, la cité engloutie

    F. Le Roux et Ch. Guyonvarc'h nous ont livré la clé qui nous permettra peut-être de mieux comprendre le véritable secret de la ville d'Ys et de cerner d'un peu plus près le pourquoi des différentes formes prises par cette légende.

    Ils écrivent :
    " La civilisation celtique est antihistorique et n'a nul besoin d'archives. Le mythe, conçu comme une explication et une illustration des origines infiniment vivant dans la mémoire humaine, est valablement permanent et immuable. L'homme qui l'accepte et qui le transmet échappe par là à la fuite du temps. Il ne craint ni la mort, ni l'écrasement chronologique de l'histoire. "

    L'histoire de la ville d'Ys commence par une saga et fini comme un sermon de curé.

    Ys, la cité engloutie

    Parti guerroyer dans les pays de glace et du soleil de minuit, le jeune Gradlon, roi de Cornouaille, met le siège devant une imprenable forteresse. Siège difficile, meurtrier, qui s'éternise tant que les barons abandonnent leur roi. Celui-ci va renoncer à son tour quand une clarté déchire la nuit : Malgwen, la reine des glaces, apparaît avec ses armes royales. Elle est séduite par la vaillance de Gradlon. Celui-ci est fasciné par la beauté de la reine...

    Ils s'enfuient vers la petite Bretagne, emportant sur leur nef un fantastique coursier noir, d'une merveilleuse rapidité.
    C'est Morvac'h, le cheval de mer. Long est le voyage... Si long que Malgwen, la fée des mers glacées a le temps de concevoir et de donner la vie à une fille, Ahés. Hélas, à peine réincarnée, la reine meurt !

    Ys, la cité engloutie

    Dans son armure d'acier-bleu, le bouclier couvrant ses jambes et le glaive en travers du bouclier, son corps est rendu à la mer par Gradlon, fou de douleur.

    Ces premiers instants marqueront à jamais le destin d'Ahès.
    Pour Gradlon, par contre, le temps des errances est révolu. En perdant son épouse, il a perdu le goût de l'aventure. Pendant de longue années, il va se consacrer à son peuple et à sa fille.


    Ys, la cité engloutie

    Alors qu'il rend justice dans sa capitale de Quimper, une étrange affaire lui est soumise : un ermite chrétien venu de Bretagne est accusé par
    une " sorcière " d'avoir fait disparaître sa fille. Le future saint Ronan se disculpe et ressuscite la fille pour faire bonne mesure. Il quitte ensuite la Cornouailles.

    Le grain est semé dans l'esprit de Gradlon. Ce que Ronan a entamé, Corentin le parachève à la faveur d'une chasse infructueuse : le roi et sa cour, affamé, arrivent près de l'ermitage de Corentin, qui se livre à une sorte de multiplication des pains. Le roi se convertit et, pour être sûr
    " de suivre en toute chose la loi de Dieu ", prend comme conseiller Gwénolé, disciple de Ronan et abbé de Landevennec. Corentin reçoit l'archevêché de Quimper.

    Le roi n'a pourtant pas prévu l'antagonisme qui oppose immédiatement les hommes de Dieu à sa fille, Ahès, que le peuple surnomme Dahud,
    " le bonne sorcière ". Tous les élément du drame sont là, prêts à se nouer. Le destin tragique de la ville d'Ys est désormais irréversible...

                                                                                                                                   Extrait de " Inexpliqué " 1981


    votre commentaire
  • Friedrich Nietzsche

    La vie a besoin d'illusion, c'est-à-dire des non-vérités tenues pour des vérités.

    ..........

     


    votre commentaire
  • Alexandra David Neel

    La vérité apprise d'autrui est sans valeur. Seule compte, seule est éfficace la vérité que nous découvrons nous même.

    ..........

    A l'origine de toute connaissance, nous rencontrons la curiosité ! Elle est la condition essentielle du progrès.

    ..........

     

      

     


    votre commentaire