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    La Dame à la licorne, la plus célèbre des tapisseries médiévales, est exposée au musée depuis 1882, après une campagne de mobilisation essentiellement menée par Prosper Mérimée. Artistes et curieux, de George Sand à Jean Cocteau, se sont passionnés pour ce trésor de savoir-faire retrouvé au château de Boussac en 1814 et présenté à l'exposition universelle en 1878. 

    L’ambiguïté de la tapisserie est présente dès le Moyen-Âge dans la figure même de la licorne. Si le sens qui a perduré jusqu'à nos jours est celui d'un animal associé à la rareté et à la pureté, d'autres représentations en font une créature mystérieuse, farouche et agressive. L'époque médiévale lui prête des propriétés magiques. Comme le sang de dragon, la corne de la licorne est réputée pour ses pouvoirs : elle purifie l'eau et détecte les poisons. Elle est très prisée, si bien qu'on la trouve dans les trésors médiévaux, comme cette dent de narval d'une longueur de
    plus 1,90 mètre.  

    La licorne est le plus souvent associée à une jeune fille, en tant que symbole de virginité, ou bien à la Vierge elle-même, dont elle est souvent la compagne. Il arrive même qu'elle soit associée au Christ, comme dans la tapisserie de l'Annonciation mystique. Sa symbolique accompagne cependant la vie de tous les jours du Moyen Âge  : tantôt aquamanile, où est mise en valeur sa fonction purificatrice liée à l'eau, tantôt blason sur les armoiries pour sa noblesse, au même titre que le lion.

    Au Moyen-Âge, la licorne est en effet considérée comme parfaitement réelle, tout au plus exotique : on la retrouve dans les bestiaires et dans les récits de voyage. Ainsi, le musée de Cluny expose un ouvrage scientifique prêté par la bibliothèque de l'université de pharmacie de l'Observatoire, qui lui consacre une très sérieuse page. Mais cette symbolique de pureté et d’innocence sainte est, paradoxalement inversée dans la Bible : les psaumes implorent Dieu de protéger les hommes de la licorne et de la gueule de loup. Elle est cette fois perçue comme dangereuse, au même titre qu'un loup. Cette vision perdure, jusqu’à être être notamment illustrée par la tenture dite de saint Etienne dans sa huitième scène : " Le corps de saint Etienne respecté par animaux sauvages ", où elle est représentée parmi les fauves. C'est la symbolique de la créature farouche, inatteignable, qui domine donc ici.        

    Présente dans plusieurs oeuvre de Gustave Moreau, la licorne est presque toujours associées à la pureté féminine, et participe à l'aura mystère qui entoure le tableau auquel elle donne son nom : Les licornes. Ses congénères y sont représentées en compagnie de jeune femmes richement parées, qui portent non seulement le lys de la virginité mais également une épée effilée. Au siècle suivant, en 1953 c'est Jean Cocteau qui, fasciné par la tenture, réécrit le mythe avec un ballet auquel il donne le nom de La Dame à la licorne, sur une musique du XVIè siècle. Les costumes évoquent là encore la blancheur et la pureté, mais le dessin que fait l'artiste de la créature rappelle avant tout son caractère farouche.

    Cette beauté éthérée qui semble jusque-là prédominer les représentations de la licorne est détournée par Nicolas Buffe et sa Peau de licorne, qui prend la forme d'une peau étalée sur le sol. A chaque angle, les sabots figurent ce qui reste de la dépouille de l'animal, ainsi que son crâne cornu et sa queue aux extrémités opposées, et Buffe fait figurer sur la peau elle-même, au milieu des volutes traditionnelles, des motifs humoristiques tirés de la pop culture. 

    Cette dissolution de la figure sacrée de la licorne trouve son point culminant dans l’ouvre la tenture L'oubli et mémoire de la Dame licorne : la Vue de Claude Rutault, qui représente la fameuse tapisserie dont les contours sont peu à peu floutés, jusqu'à ce qu'il n'en reste rien. Ainsi, après avoir été redécouverte il y a seulement deux siècles, La Dame à la licorne s'estompe à nouveau.  

    La Dame à la licorne

     


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    La période médiévale ne fut pas exempte de procès de sorcelleries ; Jeanne d'Arc elle-même dut affronter cette épreuve de janvier à mai 1431. Ce mouvement judiciaire naquit d'ailleurs véritablement un siècle auparavant, vers 1326, lorsque le pape Jean XXII promulgua en Avignon la bulle Super illius specula qui assimila la sorcellerie à une hérésie, une déviance religieuse.

    Les accusations et condamnation ne se multiplièrent pas pour autant par la suite. Si Jurdana de Irissari fut brûlée dès 1329 en Basse-Navarre, il fallut attendre 1390-1391 pour que le prévôt de Paris orchestrât en France les deux premiers procès officiels de ce genre, deux procédures qui s'achevèrent par l'exécution par le feu de quatre femmes. A vrai dire, ce n'est qu'à la fin du XVè siècle que s'accéléra l’acharnement contre les "sorcières", et ce jusqu'au milieu du XVIIè siècle. Désormais armé notamment de la bulle Summis desiderantes affectibus (1484) du pape Innocent VIII et du tristement célèbre "Marteau des sorcières" que Jacques Sprenger et Henrich Kramer publièrent en 1486, les autorités, en particulier l'Inquisition, disposaient d'armes impitoyable pour anéantir les suppôts de Satan. D'autres textes officiels et ouvrages complétèrent régulièrement ces écrits et constituèrent un véritable arsenal à destination des chasseurs de sorcières, comme la Constitutio Criminalis Carolina (1532) de Charles Quint, le Demonomanie des sorciers (1580) de Jean Blondin, et le Démonolâtrie (1595) de Nicoas Rémy. Certains au contraire, s'opposèrent à ces procs et réagirent en conséquence. Réfutant la magie et rejetant la sorcellerie dans le monde de l'imaginaire, l'humaniste repenti Cornelius Agrippa, le médecin Jean Wier, l'érudit Montaigne et l'archevêque de Contorbéry William Laud furent parmi les rares à s'insurger, vainement contre ces pratiques.

    La lutte contre les sorcières devient alors un phénomène social. Bien que les chiffres soient sujets à caution, il est probable qu'environ 100 000 procès se tinrent à travers l'Europe durant la période moderne, avec un pic entre 1560 et 1630, et que la moitié se conclurent par un condamnation à mort. Ce constat cache cependant une forte disparité régionale. L'Europe méridionale, malgré le poids de l'inquisition en Espagne et l'omniprésence de l'Eglise en Italie et l'Angleterre des Stuart furent relativement épargnées, à la fois peu confrontée tant aux procès qu'aux sentences capitales. Au contraire, la France et surtout l'Europe centrale furent aux premières loges de la chasse aux sorcières. Ainsi, la Suisse seule fut le théâtre de 8000 procès, soit plus que le total des îles britanniques et que celui des pays scandinaves qui ne dépassèrent pas chacun 5000 procédures judiciaires. Ce dernier chiffre est tout aussi éloquent lorsque l'on sait qu'il correspond au nombre d'exécutions dans le monde helvétique. De leur côté, les territoires allemands sont particulièrement hostiles à la sorcellerie. Ainsi, entre autres exemples, 99 "sorcières" furent exécutées à Wurzbourg en 1616 et 600 le furent  entre 1623 et 1630 dans l’évêché de Bamberg où, d'ailleurs une Hexenhauss (maison de sorcières) fut spécialement bâtie pour enfermer les accusées.

    Cette répartition géographique des procès n'est pas le fruit du hasard. Au-delà des hystéries collectives propres aux temps de guerre, épidémies et autres famines, ce furent tout d'abord les populations des zones pauvres et éloignées des grands centres de pouvoir, donc avec moins d'accès à l'éducation, qui furent les plus sujettes à accuser, juger et condamner aux flammes les sorcières. Le monde urbain resta relativement à l'écart de ce mouvement. Prenons pour exemple le royaume de France où les procès furent nombreux dans le Languedoc mais plus rare dans la capitale ; entre 1564 et 1639, période phare de cet épisode historique, le Parlement de Paris n'organisa que 750 procès pour sorcellerie et n'exécuta que 10% des 1094 accusés . Dans un contexte très rural où le manque d'éducation se conjuguait à des croyances encore prégnantes, les autorités locales menèrent une politique de justice impitoyable dont certaines femmes firent les frais. Le but était d’asseoir un pouvoir politique parfois contesté que de christianiser en profondeur une société paysanne superstitieuse qui gardait des traces de paganisme, notamment en terre germanique. La dimension religieuse fut incontestablement le second facteur qui caractérisait les contrées où se concentraient les procès pour sorcellerie, à savoir les zones de confrontations, voire de conflits entre catholiques et protestants. En effet, chaque camp accusait son concurrent de diabolisme et s'appliquait à combattre les complices du diable avec zèle afin de conforter et de prouver sa place de seul représentant de Dieu sur Terre. Les femme accusées de sorcellerie ne jouèrent alors que le rôle de bouc émissaire là où ces religions tentaient d'imposer leur dogme, comme ce fut le cas là où les deux Eglises coexistaient, et notamment dans les terres germaniques et helvétiques.

    Au fil des décennies puis des siècles, la chasse aux sorcières déclina cependant. Un certain équilibre religieux s'instaura entre catholicisme et protestantisme tandis que la société moderne imposait des standards qui firent oublier ceux du Moyen Âge. De plus, le cartésianisme et l'essor de la science, encore timide, contribuèrent à calmer les esprits. Dès 1620, le Parlement de Paris commença à se désolidariser de ce type de procès, avant qu'un édit de Louis XIV mette fin au crime de sorcellerie en 1632. Même la papauté, déjà, en 1657, s'était insurgée par décret contre les abus de ce type de procès. Si des "sorciers" furent encore tuées par la populace au cours du XIXè siècle, les derniers procès officiels se tinrent au XVIIIè siècle. En 1684, Alice Moland fut la dernière d'entre elles, exécutée en Angleterre, et Veronika Zeritschim clôt ce chapitre de l'histoire en terre impériale, en 1756. En 1782, Anna Göldi fut décapitée dans le canton suisse de Glaris ; dernière sorcière identifiée, sa mort précède de peu celle de deux femmes inconnues qui furent brûlées dans la ville de Poznan en 1793. Leur décès marque la fin des procès de sorcelleries en Europe. A l"heure ou Diderot publie son Encyclopédie, en 1778, la sorcellerie n'est plus qu' "opération magique, honteuse ou ridicule, attribuée stupidement par la superstition, à l'invocation et au pouvoir des démons ".       

     

     

     


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  • La magie dans le christianisme

     

    Bien avant la venue du Christ ou l’avènement de l'Eglise  catholique, l'Ancien Testament condamne déjà la magie et ses adeptes
    - "Je retrancherai de ta main les sorcelleries, et il n'y aura plus pour toi de magicien" déclare le Livre de Michée, et Dieu d'ordonner dans l'Exode : " Tu ne laisseras point vivre  la magicienne. "

    Si l'empereur Constantin Ier, dont l'Edit de 313 met fin à la persécution des chrétiens, tolère une magie thérapeutique ou protectrice des récoltes, ses successeurs élevés dans la foi en Jésus, jugent sans distinction toute pratique magique comme l'atteste l'historien Jean Gaudemet " Ammien Marcellin signale des condamnations à mort sous Constance, en 356, et sous Valentinien, en 371, en particulier pour ces cas de magie curative, que Constantin avait tolérée. "

    Plusieurs conciles du IXe siècle précisent le rapport du christianisme à la magie : Ancyre prescrit cinq ans de pénitence à ceux qui "consultent les devins" ou aux sorciers, tandis que Laodicée excommunie les prêtres et les clercs qui se seraient adonnés à la magie, à la sorcellerie, à l'astrologie ou au calcul divinatoire. Père de l'Eglise, saint Augustin définit la magie comme une activité démoniaque, de même que l’ecclésiastique Isidore de Séville qui, en 630 affirme que les magiciens "perturbent les éléments, troublent l'esprit des hommes, et, sans absorption d'aucune potion, seulement par la violence de leurs incantations, tuent ".       

    Cependant, les faits ne blâment pas aussi rudement les sorciers, que l'on admet même au sein de la communauté. Une magie plus noble, faite de divination, d'astrologie ou de chiromancie se voit quant à elle réservée aux élites lettrées. Le haut Moyen Âge s'écoulant, on en vient même à douter de la réalité de ces phénomènes, fantasmes diaboliques d'individus fragiles qui, victimes de leur esprit superstitieux, finiront par s'envoler au sabbat.

    La magie dans le christianisme

    Marqué par les ravages de la peste noire, les divisions du grand schisme de l'Eglise, les morts de la guerre de Cent Ans et, dès la fin du XVe siècle, la crise spirituelle entourant la Réforme protestante, le XIVe siècle inaugure un monde où les serviteurs de Satan trouvent une place, un univers sans repères pour la population qui trouve un bouc émissaire idéal en la figure de la sorcière.   

    1326 sonne le glas de cet héritage païen quand le pape Jean XXII  requalifie la magie - nouvelle cible de l'inquisition - d'hérésie, avant qu’Innocent VII n’officialise en 1484 la chasse aux sorcières. A partir de 1520, les accusés sont jugés par les tribunaux laïcs dont la soif de flammes excède largement celle des autorités catholiques. On compte ainsi entre 30 000 et 50 000 victimes tuée, en grande partie durant la Renaissance et en pays protestants. Les massacres s'interrompent en 1672 alors que l'affaire des Poisons secoue, sur fond de sorcellerie, la cour du roi Soleil, éclaboussant même madame de Montespan, la maîtresse du roi. Pour lui éviter un funeste destin, Louis XIV interdit désormais les bûchers.

    La méfiance du christianisme à l'égard de la magie ne le détourne pas pour autant du merveilleux, symbolisé par le miracle. Mais pourquoi les apparitions de l'Immaculée Conception à Lourdes, la résurrection de Lazare ou le vin des Noces de Cana ne constitueraient-ils pas une forme de magie ? Pour Franz Rosenzweig, philosophe juif, " le miracle est prophétisé et... réalise une prophétie. L'acte de magie est une action de l'homme qui, par ses pouvoirs, tente, par ruse ou par force, de contrer les lois de la nature et, par conséquent, la Providence divine ". 

    Le mode de pensée cartésien se développant à partir du XVIIe siècle pour finir par dominer au fil du temps, les théologiens renforcent l'examen critique du miracle, espérant ainsi apporter la preuve indiscutable de son existence et rendre évidentes les conversions. Mais les hypothèses proposées par la science contesteront sans cesse la véracité de ce phénomène. Aujourd'hui, tandis que la liberté de culte et le rationalisme hérité des Lumières se sont généralisés en Occident, les miracles n'ont pourtant pas tout à fait disparu. Des guérisons que la science n'explique pas totalement ont parfois lieu sur certains sites marqués par le passage d'un saint, qui ravivent la croyance des fidèles en ce type d'événement extraordinaire.  

          


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  • La fête des Fous

    En ouvrant son roman Notre-Dame de Paris sur la fête des Fous, Victor Hugo plonge immédiatement son lecteur dans une atmosphère de liesse populaire : " L'acclamation fut unanime : on se précipita vers la chapelle. On fit sortir le bienheureux pape des fous. Mais c'est alors que la surprise et l'admiration furent à leur comble ; la grimace était son visage.... une grosse tête hérissée de cheveux roux, entre les deux épaules une bosse énorme... Tel était le pape que les fous venaient de se donner. "

    Au XVe siècle, époque où se déroule le roman d'Hugo, la fête des Fous est, par son contenu, une véritable expression du temps à l'envers ; c'est selon la formule de l'historien Jacques Heers, " la célébration du désordre, du reversement des hiérarchies ", Organisée à l'intérieur des églises et des cathédrales, la fête des fous était un événement qui se déroulait généralement entre le 25 décembre et le 6 janvier où les sous-diacres prenaient la place des hauts dignitaires pour danser, chanter des cantiques et professer des sermons grossiers et obscènes. Au point culminant de la fête, on élisait le pape des Fous, la plupart du temps un diacre, souvent même un profane ou un étudiant.

    La fête des Fous

    Pour être élu, il s'agissait de passer sa tête dans un trou et de faire la grimace la plus laide possible. Le roi était ensuite promené, déguisé en évêque, à travers les rues de la ville, monté sur un âne. Il portait la mitre et le bonnet des fous de cours. Cette procession le conduisait solennellement à l'église ou à la cathédrale. Lorsque celui-ci s’asseyait sur le siège épiscopal après être entré dans l'édifice à l’envers sur un âne, l'office pouvait débuter. Les gestes du cérémonial étaient alors méthodiquement inversés. On y jouait souvent aux cartes et aux dés. Les bagarres étaient rares et ces rituels débridés où se mélangeaient membres du clergé et hommes du peuple échappèrent peu à peu au contrôle des autorités ecclésiastiques.

    C'est pourquoi le Concile de Nantes en 1431 et celui de Bâle en 1435 cherchèrent à proscrire la fête des
    Fous " et autres abus qui régnaient en plusieurs églises ". La disparition de la fête des Fous semble alors avoir conduit à la formation plus laïque du carnaval qui dès le XVe siècle, fut pris en charge par les instances de la société civile. Il n'en demeure pas moins que les rituels d'inversion, la présence d'un peuple de fous, les cavalcades, les mascarades, les déguisements collectifs et les défilés de chars puisent leur origine dans cette tradition médiévale de la fête des Fous.

    L'historien Jacques Heers estime que la fête de Saint Nicolas - patron des marins et des enfants, qui jouit d'une dévotion très populaire en Occident - , le 6 décembre, ouvre les festivités de la fête des Fous. D'autres auteurs considèrent que le début des festivités  est le jour de la fête des saints Innocent, commémorant le massacre des Innocents. Mais la plupart des historiens s'accordent à faire coïncider le début de la fête des Fous avec le 25 décembre, jour de Noël.         

     


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  • Noël - 25 décembre

    Au Moyen Âge, Noël ouvre une période clé du calendrier liturgique chrétien. Cette période dite "des douze jours" va du 25 décembre au 6 janvier (jour de l’Épiphanie). Elle se caractérise par un ensemble de rites et de mythes qui ont survécu jusqu'à nos jours mais dont on ignore souvent l'origine. Le fête de Noël telle que nous la connaissons aujourd'hui apparaît donc comme une manifestation d'une fusion de coutumes préexistantes qui trouvent leurs fondements dans les rites antiques mais dont les principaux éléments semblent fixés par la mythologie chrétienne de la période médiévale.

    Pour le christianisme, Noël célèbre la naissance du Christ. Le 25 décembre a été reconnu fort tardivement comme le jour anniversaire de la naissance de Jésus. En effet, selon les époques et les diverses religions chrétiennes, avant d'être fixée au 25 décembre ; cette date anniversaire a été placée à différents moments de l'année : le 6 janvier (Épiphanie), le 25 mars (Annonciation), le 10 avril ou encore le 29 mai. Le théologien Clément d'Alexandrie, qui a écrit vers 200 après J.-C. mentionne certaines des dates qui ont déjà été proposées comme la date authentique de la naissance de Jésus Christ. Les nativités printanières étaient les plus populaires, avec de nombreuses dates en mars, en avril ou en mai. Le 25 décembre n'est pas mentionné. 

    L'Eglise n'a fixé cette date qu'au IVe siècle de notre ère. La commémoration de la naissance du christ le 25 décembre résulte de contraintes à la fois saisonnières et mythologiques imposées par les croyances païennes antérieures au christianisme. En effet, l'importance accordée aux anciennes fêtes du solstice d'hiver, le souvenir des Saturnales romaines et la place considérable qu'avait acquise dans l'Empire romain le culte de Mithra expliquent pour une bonne part ce choix. Ces pratiques ne pouvaient que préparer le subtil syncrétisme mis en oeuvre par les chrétiens pour assimiler la naissance de Jésus au retour de l'astre solaire. Au milieu du IVè siècle, le 25 décembre est déjà retenu à Rome comme la fête de la Nativité du Christ. Au début du siècle suivant, la fête de Noël est placée sur pied d'égalité avec celles de Pâques et de l’Épiphanie, laquelle commémore désormais la venue des Rois mages. En 440, l'Eglise décide officiellement de célébrer la naissance du Christ le 25 décembre et Noël devient une fête d'obligation au début du VIè siècle. 

    Selon Philippe Walter : "La fête de Noël appartient au temps de la féerie et permet l'effraction de l'autre monde dans le monde humain". Noël valorise les forces de la nuits ainsi que les puissances du mystère et du merveilleux. Pour l'historien, la traduction chrétienne de cet ensemble mythique laisserait affleurer la mémoire archaïque du paganisme qui oriente la fête médiévale. A ce titre, le repas de Noël s'associe au motif du repas des fées, bien connu grâce à certains textes médiévaux ainsi qu'à certains contes folkloriques. Si l'on en croit ces textes littéraires, le repas des fées se tient à la naissance de certains enfants prédestinés. C'est ainsi que les fées se présentèrent la nuit où naquirent les héros comme Ogier le Danois ou Guillaume au court nez pour doter l'enfant de grandes vertus. N'était-il pas naturel alors de fixer la nativité du Christ durant cette nuit des mères - ou nuit des fées - au cours de laquelle on célébrait déjà la naissance de héros mythique parfaitement profanes ? La fixation de Noël au 25 décembre répondait alors aux coutumes païennes du repas des fée associé à une naissance exceptionnelle. 

     


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